L’algérie chaotique de ben bella à tebboune…toute une histoire depuis 1962

HIBAPRESS-RABAT-Agences

Le régime algérien est presque immuable depuis l’indépendance en 1962. Le principal objectif de l’oligarchie qui le dirige consiste à durer, en faisant taire les opposants comme Boualem Sansal.

L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal a été arrêté à Alger et incarcéré pour ses critiques du pouvoir et de certains épisodes du récit national officiel. Les opinions de l’intellectuel lui valent d’être poursuivi pour «crimes qualifiés d’actes terroristes ou subversifs» et il risque la prison à perpétuité.

La fuite en avant d’Alger, déjà manifeste par ses attaques régulières contre Paris et Rabat, invite à raconter l’histoire du régime algérien, presque inchangé depuis 1962:

Les trois premières années de l’Algérie indépendante, sous A. Ben Bella, constituent une période de transition et de gestation, souvent chaotique et agitée. Le discours est souvent populiste mâtiné de socialisme, indiquant la nécessité pour le « peuple » de recueillir les fruits des lourds sacrifices accomplis durant la guerre. Une vision socialisante qui n’est pas considéré comme une transposition des orientations d’Europe de l’Est. La composante religieuse joue ici un rôle significatif. Il était donc nécessaire, pour les dirigeants algériens, de réaliser une adéquation entre un certain nombre de principes socialistes et l’islam.

L’entourage de A. Ben Bella était très influencé par une mouvance marxisante. De nombreux conseillers étrangers peuplaient son cabinet et faisaient de l’Algérie un « laboratoire de la révolution » assez hétéroclite, certains de ces conseillers algériens se rattachant également à cette mouvance.

Après la destitution de A. Ben Bella et la prise de pouvoir par H. Boumediène et son équipe, en juin 1965, la direction du pays se trouve concentrée entre deux institutions principales, d’une part le Conseil de la Révolution, instance d’orientation et de contrôle, et, d’autre part, le Conseil des ministres, organe d’exécution, H. Boumediène étant à la fois président du Conseil de la Révolution, président du Conseil des ministres et ministre de la Défense (fonction qu’il occupait déjà sous A. Ben Bella). Quelques membres du Conseil de la Révolution sont également ministres. Ce conseil est constitué à l’origine de 25 membres, ceux-ci représentent en fait les principales tendances du Front de libération nationale (FLN), parti unique au pouvoir, et les composantes de l’armée. Celle-ci est un protagoniste majeur, bien que souvent discret, de la scène politique algérienne. En effet, la plupart des chefs d’État algériens en sont issus ou bien choisis avec son assentiment. Elle exerce un rôle central dans les évolutions politiques depuis l’indépendance, et ce de façon encore plus manifeste depuis 1992.

Sur le plan institutionnel, le pouvoir cherche à se légitimer en organisant des élections au niveau communal, en 1967, et provincial, en 1969. En 1976, un projet de Charte nationale est proposé à la population pour discussion et amendement, avant d’être adopté par référendum. Ce document doctrinal de base constitue le recueil des principes organisateurs du régime. Symptômatiquement, la nouvelle Constitution est adoptée après la Charte. S’ensuivent les élections du président de la République au suffrage universel, en décembre 1976, et de l’Assemblée populaire nationale (APN), en février 1977. Dans le même temps, le FLN et ses organisations sont réactivés. Mais cette solidification politico-institutionnelle est interrompue par le décès du président H. Boumediène en décembre 1978.

Un Congrès du FLN a lieu en janvier 1979 pour désigner son secrétaire général, appelé à être candidat unique à la présidence de la République, l’armée jouant un rôle majeur dans la désignation du nouveau dirigeant. Deux tendances s’opposent : l’une, modérée, soutient le ministre des Affaires étrangères, A. Bouteflika (qui a exercé ces fonctions durant toute la période Boumediène) ; l’autre, attachée à la fermeté idéologique, pousse le secrétaire permanent du FLN, Mohamed Salah Yahyaoui. Tous deux sont membres du Conseil de la Révolution. Vu le blocage de la situation, le choix se porte sur un candidat dit de consensus, peu connu, le colonel C. Bendjedid, jusqu’alors chef de la région militaire d’Oran et également membre du Conseil de la Révolution. Du fait de son inexpérience politique, du peu d’appuis structurés dont il bénéficie et de la solidité des réseaux déjà existants, il est considéré par ceux qui l’ont désigné comme un simple président de transition.

Le nouveau président et son entourage entreprennent également le démantèlement graduel de ce qui avait été édifié par son prédécesseur. Ainsi, l’option de type socialisante est abandonnée pour aboutir à une plus grande libéralisation de l’économie.

Au niveau politique, le FLN retrouve une place importante. Un Bureau politique (BP) et un Comité central (CC) sont constitués. Le BP assume le rôle d’instance supérieure d’orientation et de décision pour ce qui est des options politiques, idéologiques et socio-économiques. Le CC adopte, quant à lui, à l’issue de discussions et de débats, les grandes décisions doctrinales.

L’abandon des options socialisantes et l’évolution vers une libéralisation de l’économie s’accentuent, notamment au profit de certains clients et obligés du nouveau pouvoir, souvent selon des méthodes de gestion des finances publiques assez particulières. Les faits et comportements de corruption, de malversation et de prévarication se développent.

Les émeutes populaires d’octobre 1988 déstabilisent gravement le régime et incitent le président algérien à se lancer dans un processus de « démocratisation ». C. Bendjedid, candidat unique, est réélu à la présidence en décembre 1988, et une nouvelle Constitution est adoptée en février 1989, ouvrant la voie au multipartisme. Un foisonnement de partis politiques se fait jour, dont certains sont très éphémères. Des élections municipales pluralistes ont lieu en juin 1990. Elles modifient profondément le paysage politique algérien, auparavant monopolisé par le FLN, avec l’émergence d’un parti fondamentaliste, le Front islamique du salut (FIS).

Le premier tour des élections législatives se déroule le 26 décembre 1991. Face à la perspective d’une éventuelle victoire du FIS au second tour, le processus électoral est suspendu suite à la démission de C. Bendjedid le 11 janvier 1992. Un Haut comité d’État (HCE) de cinq membres est établi pour remplacer C. Bendjedid démissionnaire, avec M. Boudiaf à sa tête. Leader historique du FLN durant la guerre d’Algérie, Mohamed Boudiaf était, depuis l’indépendance, un farouche opposant au régime en place. Le FIS est dissous, en dernier recours, par la Cour suprême en avril 1992. Cette période marque l’intensification de la confrontation armée entre le pouvoir et des groupes armés. Ces affrontements sanglants se déploient sur une large échelle. Les événements tragiques qui frappent l’Algérie ont provoqué au moins 25O 000 morts et affecté environ 1 million de personnes (déclaration effectuée en 1999).

Le président M. Boudiaf est assassiné le 29 juin 1992 à Annaba par un des membres des forces de sécurité chargées de sa protection, aux supposées connexions fondamentalistes. Les circonstances exactes de cet assassinat ne sont pas, à ce jour, élucidées. M. Boudiaf est remplacé par A. Kafi. En janvier 1994, une Conférence nationale désigne le ministre de la Défense, L. Zeroual, « président de l’État », A. Bouteflika, pressenti pour occuper ce poste, ayant finalement décidé de décliner cette proposition.

En novembre 1995, des élections présidentielles sont organisées. L. Zeroual, l’un des quatre candidats, remporte officiellement le scrutin avec 61,3 % des suffrages exprimés. Un an plus tard, une nouvelle Constitution est adoptée par référendum. Elle renforce les pouvoirs du président de la République et crée notamment une seconde chambre parlementaire, le Conseil de la nation (équivalent à un Sénat), la première étant, depuis 1977, l’Assemblée populaire nationale (APN). En juin 1997, des élections législatives ont lieu. Le parti présidentiel, nouvellement créé sous le nom de Rassemblement national démocratique (RND), n’obtient pas la majorité absolue à l’APN. Dès lors, un gouvernement de coalition est formé avec des ministres issus de plusieurs partis. Les élections locales et régionales se déroulent en octobre 1997. Elles tournent en faveur du RND. Les partis d’opposition en contestent vigoureusement les résultats et émettent de vives accusations de fraude.

En septembre 1998, L. Zeroual annonce qu’il n’ira pas au terme de son mandat et que des élections auront lieu l’année suivante. Les élections présidentielles d’avril 1999 aboutissent à l’élection d’A. Bouteflika. La totalité des autres candidats avaient décidé de boycotter le scrutin. Le nouveau président propose, peu après son arrivée au pouvoir, de mettre en œuvre un processus de concorde civile, dont le principe est accepté par la population à l’issue d’un référendum organisé en septembre 1999. Les conséquences de ce processus sont contestées tout comme la gestion de nombreux dossiers de politique intérieure, tels que la situation de la justice et de l’information ainsi que les revendications liées à la question berbère (graves émeutes populaires en Kabylie depuis avril 2001).

Abdelmadjid Tebboune, né le 17 novembre 1945 à Mécheria dans l’ouest de l’Algérie, a été réélu président de la République au premier tour de l’élection présidentielle qui s’est déroulée le 7 septembre 2024, pour un deuxième mandat. En décembre 2019, il a succédé à Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis avril 1999, contraint à la démission par une vague de contestation contre sa candidature à un cinquième mandat. Haut fonctionnaire de carrière, Abdelmadjid Tebboune a été ministre dans plusieurs gouvernements et Premier ministre du 25 mai au 15 août 2017. Candidat indépendant tout en étant membre du parti FLN, qui ne le soutient pas officiellement en 2019, il a remporté une élection présidentielle marquée par une abstention record. Les manifestations massives du Hirak et la pandémie de Covid-19 ont marqué le début de son mandat. C’est le premier président de l’Algérie à ne pas être issu des rangs des anciens combattants de la guerre d’indépendance.

Il y a des jours où l’on se demande si l’actualité algérienne ne nous réserve pas une nouvelle catégorie de satire, celle où la réalité dépasse la fiction. Le dernier coup d’éclat de Monsieur Tebboune, président d’une Algérie qu’il aime à imaginer plus grande qu’elle ne l’est, a de quoi laisser perplexes même les plus créatifs des humoristes et pour l’exemple, lors de son dernier meeting à Oran, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a une nouvelle fois surpris tout le monde.

Devant une foule acquise à sa cause – ou du moins, à défaut de mieux – il a fièrement déclaré que l’Algérie est désormais la troisième économie mondiale. Rien que ça! Selon lui, «le monde tout entier nous jalouse». Une déclaration qui a rapidement enflammé les réseaux sociaux, où les internautes n’ont pas manqué d’ironie pour commenter cette annonce quelque peu… ambitieuse.

Cette déclaration s’inscrit dans la droite ligne de celles auxquelles le président nous a habitués ces dernières années. Après avoir vanté des chiffres record sur le dessalement de l’eau de mer et proclamé l’engagement de l’armée algérienne pour construire des hôpitaux à Gaza, Tebboune ajoute une nouvelle perle à son collier de promesses flamboyantes. Le timing est, bien sûr, parfait : en pleine campagne électorale, où l’absence d’opposition et de presse libre laissent libre cours aux annonces les plus audacieuses.

 

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